Quant aux négociations entre Bakou et Erevan, il y a longtemps qu’elles n’ont pas été aussi soutenues. Le débat porte sur le meilleur des deux plans, celui d’Anthony Blinken ou celui de Sergey Lavrov. Cependant, la diplomatie s’accompagne d’une nouvelle escalade militaire à la frontière arméno-azérie, à Sotk et Kout (région de Gegharkunik). « Le nombre de pourparlers organisés et planifiés n’aboutit pas à des compromis qualitatifs », estime Sergueï Markedonov, expert auprès du ministère russe des Affaires étrangères.

Les négociations entre Bakou et les hauts représentants d’Erevan n’ont pas été aussi intenses depuis longtemps. C’est le constat de Sergei Markedonov, éminent chercheur à l’Institut d’études internationales de l’Institut d’État de Moscou des relations internationales du ministère russe des Affaires étrangères (MGIMO), candidat aux sciences historiques, répond à ses questions.

« Jugez-en par vous-même. Du 1er au 4 mai, les ministres des Affaires étrangères arménien et azéri se sont entretenus aux États-Unis, avec pour interlocuteurs Antony Blinken, secrétaire d’État et Jake Sullivan, conseiller à la sécurité nationale de Joe Biden. Le Conseil de l’UE a prévu de rencontrer Ilham Aliyev et Nikol Pashinyan à Bruxelles le 14 mai, et Olaf Scholz, Emmanuel Macron et Charles Michel devraient rencontrer les deux dirigeants à Chisinau le 1er juin, en marge d’une réunion de la deuxième communauté politique européenne. En d’autres termes, le “format de Prague” se poursuivra. Une réunion ministérielle entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan est prévue le 19 mai à Moscou », publie l’expert russe sur Telegram.

Cependant, Markedonov constate que tous ces gestes diplomatiques s’accompagnent d’une nouvelle escalade militaire à la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. « Les localités de Sotk et de Kout (région de Gegharkunik) sont les plus fréquemment mentionnées dans les médias du Caucase et sur Internet au cours des deux derniers jours. Il convient de noter que la question de la communication entre Erevan et Stepanakert n’est toujours pas résolue. Le nombre de pourparlers organisés et planifiés n’aboutit pas à des compromis qualitatifs », dit-il.

« Comment cela coïncide-t-il et qu’est-ce que cela peut signifier ? Les représentants des différents pays médiateurs en jeu parlent d’un “rapprochement significatif des positions” entre Erevan et Bakou. En même temps, “sur le terrain”, si un tel rapprochement a lieu, c’est uniquement sur le plan militaire, et non sur celui des compromis », remarque Sergei Markedonov.

Selon l’expert, les émotions suscitées par un tel développement sont compréhensibles et compréhensibles : « Mais essayons de nous en affranchir. La combinaison dialectique de négociations et d’escarmouches est-elle apparue uniquement dans le conflit arméno-azéri en 2023 ? Non, bien sûr que non ! Le “pendule du Karabagh” fonctionne correctement depuis de nombreuses années. Il a fonctionné aussi bien dans le cadre de l’ancien statu quo (jusqu’en 2020) qu’après la “guerre d’automne” et la formation d’un nouvel ordre régional dans le Caucase. L’essence de l’algorithme du “pendule” est une combinaison de réunions diplomatiques et d’une confrontation énergique “sur le terrain”. L’objectif est évident ! Il est nécessaire de renforcer les arguments à la table des négociations. Le facteur de puissance est précisément orienté vers la réalisation de cet objectif. »

Actuellement, il existe une concurrence entre les projets de construction de la paix. L’Occident (USA+France en son nom propre+UE) et la Russie parlent tous deux de la paix et tentent de s’en rapprocher. Cependant, leur vision respective est très différente quant à ce que devrait être un bon pour le Caucase (et pas seulement pour le Caucase !). Il en résulte une complication du processus de règlement, selon l’expert.

Finalement, toutes les initiatives visant à résoudre le conflit arméno-azéri ont été et sont proposées par des parties extérieures. Le débat porte sur le meilleur plan, celui d’Anthony Blinken ou celui de Sergueï Lavrov. « Lorsque l’Arménie dominait, elle imitait le processus de négociation, cherchant à retarder les concessions de son côté », pense l’analyste russe. « Aujourd’hui, c’est l’Azerbaïdjan qui domine, désireux de rapprocher le dénouement le plus rapidement possible. Quant à l’Ukraine, Dieu sait ce qu’il en adviendra : mieux vaut battre le fer tant qu’il est chaud ! En conséquence, le “pendule” s’est mis à osciller. Par conséquent, le risque de nouvelles escalades demeure, tout comme la signature d’une paix précipitée, qui, je le crains, ne garantit pas contre de nouvelles fluctuations brutales. »

Source principale : t.me