La situation avec la Russie est inverse. Cette dernière a entrepris de préserver le facteur arménien dans la région. Non pas parce qu’il aime les Arméniens, mais parce que ce seul facteur permet à la Russie de maintenir sa présence et son influence militaire et politique dans la région.

L’Occident de son côté a trompé l’Arménie et bradé 120 000 Arméniens du Haut-Karabagh en contrepartie du pétrole et du gaz de l’Azerbaïdjan. Et les négociations avec l’Azerbaïdjan sur les plateformes occidentales n’ont qu’un seul but : provoquer une nouvelle agression de Bakou. Cette opinion a été exprimée dans une interview accordée à Sputnik Armenia par Artur Khachikyan, politologue, docteur de l’université de Stanford et membre du mouvement Mère Arménie.

Le seul objectif de l’Occident lors des pourparlers entre Erevan et Bakou est qu’ils signent un document et sacrifient ensuite les Arméniens du Haut-Karabagh, évinçant ainsi la Russie de la région. Il a rappelé la récente déclaration du porte-parole du département d’État américain selon laquelle Washington salue la volonté des dirigeants azerbaïdjanais d’“amnistier” (les représentants du Haut-Karabagh – ndlr). Selon M. Khachikyan, cette déclaration ne signifie qu’une chose : l’Occident a vendu 120 000 Arméniens contre du pétrole et du gaz azéris.

L’expert considère que le paradigme dans lequel se déroule actuellement le processus avec l’Azerbaïdjan est dangereux. Et cette menace est principalement due à la position défaitiste des autorités arméniennes, à leur volonté de céder le Haut-Karabagh et les prétendues enclaves en échange d’une paix fictive.

« Ni la cession du Haut-Karabagh ni le transfert des enclaves ne changent la position de l’Azerbaïdjan dans les négociations. Bakou ne fera aucun compromis. Une fois que l’Azerbaïdjan aura obtenu le Haut-Karabagh, il voudra Syunik », a déclaré M. Khachikyan.

L’expert n’est pas convaincu que le “certificat cadastral” promis par le Premier ministre Nikol Pashinyan dissuadera l’Azerbaïdjan d’une probable agression contre la région de Syunik.

Plus tôt à Chisinau, lors d’une réunion avec la communauté arménienne de Moldavie à la suite des pourparlers à cinq, M. Pashinyan a déclaré qu’il souhaitait laisser un “certificat cadastral” de la République d’Arménie pour la postérité.

« J’invite les dirigeants actuels à se préparer soigneusement avant chaque discours public et à éviter d’utiliser une métaphore aussi malheureuse que l’expression “certificat cadastral”. La République d’Arménie a été reconnue par la communauté internationale en 1991. En fait, si nous n’avons pas de “certificat cadastral”, dans quel pays Pashinyan a-t-il été élu Premier ministre en 2018 ?

Selon l’analyste politique, les déclarations du Premier ministre selon lesquelles l’Arménie souhaite éliminer et neutraliser toutes les causes et raisons d’une éventuelle escalade à l’avenir ne résistent pas non plus à la critique.

« Pashinyan devrait comprendre qu’il existe déjà une raison à l’agression azérie. Bakou réclame un corridor à l’Arménie, exige le retour des Azerbaïdjanais sur leurs “terres historiques”, et ces revendications sont soigneusement alimentées par la Turquie », estime M. Khachikyan.

Il ne considère pas la signature d’un traité de paix comme une garantie de stabilité et de paix à long terme. Les accords de Minsk entre la Russie et l’Ukraine en sont un excellent exemple. Des années après leur signature, les anciens dirigeants français et allemands ont fini par admettre que ces documents n’étaient destinés qu’à aider l’Ukraine à gagner du temps.

Khachikyan est convaincu que l’Azerbaïdjan déclenchera de nouvelles hostilités au moment le plus opportun. En particulier, une nouvelle escalade de la confrontation sur la voie ukrainienne accroît la menace d’une agression de la part de Bakou, et la fameuse communauté internationale ne le remarquera tout simplement pas.

Selon le politologue, la situation avec la Russie est inverse. Cette dernière a entrepris de préserver le facteur arménien dans la région. Non pas parce qu’il aime les Arméniens, mais parce que ce seul facteur permet à la Russie de maintenir sa présence et son influence militaire et politique dans la région.

L’expert n’est pas du tout enclin à penser que l’Arménie devrait abandonner les négociations. Mais il faut changer les négociateurs à Erevan. Les dirigeants actuels ont échoué dans leur politique étrangère ; leurs actions ineptes ont provoqué la guerre et la défaite en 2020 et menacent de provoquer de nouvelles catastrophes aujourd’hui. L’abandon du parapluie de sécurité russe il y a cinq ans et la recherche de ce parapluie en Occident, à un moment où les politiciens occidentaux qualifient les dirigeants azéris de partenaires de confiance, décrivent le mieux l’échec de l’équipe actuelle à Erevan.

Source principale : 7or.am